Poutine se rendra-t-il  à son propre rendez-vous ?

Il y avait ces derniers jours sur la table deux propositions en vue de la paix en Ukraine, l’une venant des dirigeants européens réunis à Kiev alors que la Russie fêtait le Jour de la Victoire, et l’autre du président russe faite quelques heures plus tard, laquelle appelait à des négociations directes à Istanbul pour […]

Mai 12, 2025 - 21:15
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Poutine se rendra-t-il  à son propre rendez-vous ?
Il y avait ces derniers jours sur la table deux propositions en vue de la paix en Ukraine, l’une venant des dirigeants européens réunis à Kiev alors que la Russie fêtait le Jour de la Victoire, et l’autre du président russe faite quelques heures plus tard, laquelle appelait à des négociations directes à Istanbul pour le 15 mai. On savait que la Russie ignorerait l’offre européenne. On en était d’autant plus certain qu’elle était assortie d’un ultimatum, un peu comme si ses auteurs convaincus par avance de ne pas être écoutés s’étaient arrangés pour rendre leur  demande plus irrecevable encore, se donnant par là même l’illusion d’avoir été en mesure de faire autrement. L’ultimatum européen signifié le 10 mai expirait quelques heures plus tard, le lundi ou le mardi d’après, ce qui montre bien qu’il n’était pas sérieux. Dès avant son expiration du reste, Volodymyr Zelensky, peut-être seulement sous la pression de Donald Trump, faisait savoir qu’il serait le 15 à Istanbul pour y attendre son homologue russe Vladimir Poutine. C’était lui l’invité au départ, le voilà maintenant dans le rôle de l’invitant. La question ne s’en pose pas moins de savoir si le président russe serait bien au rendez-vous, qui plus est, à un rendez-vous fixé par lui personnellement ?
C’est en effet lui qui le premier a parlé d’Istanbul et du 15 mai. En principe, il n’aurait rien fait de tel s’il n’avait pas l’intention d’être au rendez-vous, à son propre rendez-vous. Or plusieurs heures ont passé depuis que Zelensky a fait savoir qu’il y serait lui, pour y attendre Poutine, sans que celui-ci ait confirmé sa présence en temps et lieu. Le choix d’Istanbul n’est évidemment pas fortuit mais le retour à un moment du passé où les négociations étaient sur le point d’aboutir, avant que le Premier ministre britannique de l’époque, Boris Johnson, ne débarque par surprise à Kiev en avril 2022 pour presser les Ukrainiens de s’en retirer sous peine d’un arrêt immédiat du soutien occidental. Trois années plus tard d’une guerre à haute intensité, et après bien des péripéties, des morts, des blessés, qui se comptent pas milliers des deux côtés, des destructions et des pertes de territoires par l’Ukraine, voilà qu’il faille de nouveau se retrouver à Istanbul pour discuter quasiment les mêmes points épineux sur lesquels un accord était pourtant en train d’être conclu. A Istanbul, il n’y aura qu’un seul intermédiaire, mais sur qui on peut compter pour faire avancer la négociation : Tayyip Erdogan, quelqu’un d’autant plus crédible qu’il est neutre et respecté par les deux parties. La France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne, ainsi que leur cohorte de  » pays volontaires « , n’auront pas leur mot à dire, cela va de soi. L’accord de mars 2022 comportait des clauses qu’il faut s’attendre à retrouver dans le cours des pourparlers qui viennent. C’est le cas notamment de la neutralité de l’Ukraine, en d’autres termes l’impossibilité pour elle de devenir un jour membre de l’Otan, ce qui doit figurer dans sa nouvelle Constitution. En 2022, les quatre oblasts aujourd’hui russes n’étaient pas encore annexés, ils le seraient à la fin septembre de la même année. La Russie ne les restituera pas, cela aussi semble une évidence.