Bourses universitaires : Ce qu’en pensent les étudiants
En prévision de la rentrée universitaire 2025/2026, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a annoncé l’ouverture de la plate-forme nationale de demande de bourse universitaire. Les nouveaux bacheliers auront jusqu’au 15 septembre pour déposer leurs dossiers en ligne. Une mesure bien accueillie pour les nouveaux bacheliers, mais beaucoup d’étudiants estiment que […] The post Bourses universitaires : Ce qu’en pensent les étudiants appeared first on Le Jeune Indépendant.

En prévision de la rentrée universitaire 2025/2026, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a annoncé l’ouverture de la plate-forme nationale de demande de bourse universitaire. Les nouveaux bacheliers auront jusqu’au 15 septembre pour déposer leurs dossiers en ligne. Une mesure bien accueillie pour les nouveaux bacheliers, mais beaucoup d’étudiants estiment que le montant des bourses reste trop faible pour faire face aux dépenses du quotidien.
Finies les longues files d’attente, cette année, les nouveaux bacheliers pourront déposer leur demande de bourse exclusivement en ligne, via le lien https://progres.mesrs.dz/eminha/login.xhtml, a précisé le ministère. Une mesure qui vise à simplifier les démarches, accélérer le traitement des dossiers mais surtout à éviter aux étudiants, notamment ceux venant de régions éloignées, des déplacements souvent contraignants.
Dans cette optique, un seul document est exigé : le relevé des revenus des parents, toujours selon la même source. Le montant de l’allocation est fixé à 1 950 DA par mois pour les étudiants de licence et à 2 400 DA pour ceux en Master 2, selon les témoignages recueillis. Une aide jugée précieuse par de nombreux étudiants mais considérée comme « largement insuffisante » pour couvrir leurs dépenses réelles. L’augmentation intervenue depuis l’année universitaire 2023/2024 ne suffit pas, elle non plus, à répondre aux besoins concrets, selon plusieurs étudiants interrogés.
Dans les couloirs bondés de l’Université d’Alger 2 à Bouzaréah, dans le département des langues étrangères, le sujet des bourses anime les conversations chaque année. Pour Lynda, étudiante en littérature (langue française), originaire de Tizi Ouzou, « recevoir une bourse correcte est très important, car sans cela, beaucoup d’étudiants ne peuvent même pas se permettre de poursuivre leurs études ». La jeune femme surenchérit aussitôt : « 1 950 DA, c’est à peine quatre ou cinq jours de nourriture. Le reste du mois, comment fait-on ? »
Même son de cloche du côté de Yacine, étudiant en licence d’espagnol, qui considère que « cette bourse n’a pas évolué avec le coût de la vie ». Selon lui, « les étudiants doivent acheter des livres, des polycopiés, payer leur nourriture et parfois leurs déplacements pour arriver à l’heure en cours, notamment lorsqu’ils manquent le bus universitaire. Avec 2 000 DA, on ne peut pas faire grand-chose aujourd’hui ».
Les revenus parentaux dans la balance
Au-delà des montants, c’est la logique même du dispositif qui interroge certains étudiants. Le ministère exige le relevé des revenus des parents comme unique document justificatif. Une condition contestée par plusieurs voix sur les campus. « Ce n’est pas normal de juger de nos besoins en fonction du salaire de nos parents », estime Samira, étudiante en linguistique (langue française). « Certains parents, bien qu’aisés, n’aident pas forcément leurs enfants. D’autres, même avec un salaire correct, ont souvent d’autres charges à assumer, parfois plusieurs enfants à l’école. Le calcul reste injuste et ne reflète pas toujours la réalité », souligne-t-elle. Cette revendication d’un critère plus souple est régulièrement portée par les étudiants, qui plaident pour une prise en compte individualisée des situations.
Au-delà de la question financière, de nombreux étudiants soulignent les difficultés liées à la vie universitaire. A Bouzareah, Riad, étudiant en psychologie, exprime sa frustration : « La restauration est de mauvaise qualité. D’ailleurs, il nous arrive de ramener nos propres cuillères et fourchettes pour pouvoir manger. Comment peut-on parler d’améliorer la vie des étudiants si, au restaurant universitaire, on n’a même pas les couverts nécessaires ? », avant d’ajouter : « Nous sommes parfois obligés d’acheter de la nourriture, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de l’université, et cela coûte cher ».
Cette situation, loin d’être isolée, alimente le sentiment d’abandon ressenti par de nombreux étudiants. Yacine affirme : « On parle beaucoup des bourses, ce qui est légitime, mais il faudrait aussi évoquer les résidences universitaires dépourvues de connexion Wi-Fi. La plupart d’entre nous sont contraints de recharger, à leurs frais, des forfaits internet dont le coût mensuel est élevé. »
Face à ces difficultés, les étudiants et leurs organisations syndicales réclament depuis des années une réforme de fond du système de bourses. « Nous avons proposé une revalorisation progressive pour atteindre 10 000 DA par mois », rappelle Lynda. Une revendication relayée à plusieurs reprises par les syndicats étudiants, qui estiment que ce montant serait « le minimum vital » pour un étudiant forcé de subvenir à ses besoins quotidiens.
L’essentiel reste à faire !
Si certains saluent le pas franchi par le ministère en allégeant la procédure de demande (via le site), beaucoup considèrent que l’essentiel reste à faire. « C’est une avancée, on n’a plus besoin de passer des heures dans les files d’attente », estime Lamis, étudiante en sociologie. Même son de cloche pour Sara, en traduction, qui déclare que « la plate-forme en ligne nous fait gagner du temps et simplifie les démarches ». Mais pour d’autres, le problème est ailleurs : « La priorité, ce n’est pas seulement de simplifier l’administration, mais de donner aux étudiants les moyens de vivre et d’étudier dignement », tranche Samira.
Pour Amel, jeune étudiante en histoire, « la bourse que nous recevons est suffisante, car de nombreuses choses nous sont offertes gratuitement. Nous n’avons pas à payer pour le restaurant, le transport ou le logement, ce qui représente un avantage considérable pour moi, surtout que je viens de la wilaya de Mascara pour poursuivre mes études ».
La question de bourse reste au cœur des préoccupations estudiantines. Loin d’être une simple aide symbolique, elle représente pour beaucoup une condition sine qua non pour garantir l’égalité des chances, permettant ainsi la poursuite des études supérieures dans un cadre décent. Les étudiants reconnaissent toutefois un acquis majeur. Les inscriptions demeurent gratuites, contrairement à d’autres pays où prévaut une logique capitaliste aberrante de sacro-sainte rentabilité financière, souvent au détriment de l’ascension sociale et de la transmission du savoir.
The post Bourses universitaires : Ce qu’en pensent les étudiants appeared first on Le Jeune Indépendant.