Si Israël a des raisons de se réjouir du retour de Donald Trump à la tête des Etats-Unis, il en est tout autrement des membres de l’Otan, et d’une façon plus générale des alliés d’Europe occidentale des Etats-Unis, pour qui ce deuxième mandat est au contraire et pour le moins synonyme d’incertitude. Pour autant d’ailleurs qu’il ne conduise pas à la rupture d’avec un pays qui jusque-là a été leur leader incontesté et incontestable. A Bruxelles, avant-hier, leurs ministres de la Défense, qui à cette occasion ont fait la connaissance de leur nouveau homologue américain, Pete Hegseth, certes ne sont pas allés jusqu’à prendre franchement le contrepied des positions de Donald Trump sur la manière de terminer la guerre en Ukraine, ils ont néanmoins tenu à s’en démarquer, d’autant plus nettement d’ailleurs qu’ils ne sont pas encore assurés de prendre part au rétablissement de la paix sur leur continent. Pour Israël, ce nouveau mandat de Trump est une opportunité à saisir, une chance historique dont il faut savoir exploiter chaque promesse, chaque possibilité, un moment privilégié de l’histoire. S’il sait comment conduire sa barque, il peut faire du moment présent le début d’un âge d’or, réplique de celui que Trump a annoncé pour son propre pays dans son discours d’investiture du 20 janvier, leurs deux destins étant indissolublement liés.
Le doute dont il est assailli depuis le 7 octobre 2023 se dissipera totalement dès lors que ses otages, tant les vivants d’entre eux que les morts, seront retournés en Israël, une perspective qui du reste s’est beaucoup rapprochée ces derniers temps. La crise des otages, pense Israël, est la dernière grande épreuve à vivre, avant que commence la phase finale de la spoliation des Palestiniens : l’annexion de la Cisjordanie. Les Israéliens ne disent pas encore qu’ils voient en Trump le Messie de la fin des temps, mais c’est probablement juste parce que la crise des otages n’est pas encore résolue, et qu’il faille attendre qu’elle le soit avant de rien entreprendre de grandiose et de définitif. Les Occidentaux eux sont dans des sentiments tout différents de ceux que les Israéliens s’efforcent de maîtriser. Le doute dans leur cas, n’est pas derrière eux mais devant eux. Trump a déjà parlé à Poutine, ce qui déjà n’augure rien de bon, en plus de n’être en rien un gage de respect à leur égard. Un allié ne négocie pas tout seul avec l’ennemi commun. Il se réunit d’abord avec ceux de son camp, leur expose son plan pour la paix, écoute leurs avis, ensuite seulement il va parlementer avec l’ennemi si telle est son intention. Trump ne leur parlera qu’après s’être entendu avec ce dernier, et seulement pour leur demander d’approuver l’accord intervenu entre eux. Pete Hegseth a exclu à Bruxelles le retour aux frontières de 2014. Tout le monde a compris qu’il faisait en fait allusion à celles de 2022. La paix à construire ne mettra pas en cause l’annexion des quatre régions déjà passées pour l’essentiel sous le contrôle de la Russie. Elle exclut aussi l’entrée de l’Ukraine à l’Otan. Tout le reste par contre semble encore ouvert à la discussion. Les alliés occidentaux des Etats-Unis sont libres d’accepter ces propositions pour la paix sur leur continent ou de les rejeter. Normalement ils devraient les repousser, ne serait-ce que parce qu’on ne leur a pas demandé leur avis. Mais leur refus, si c’est lui qui prévaut, sera un grand saut dans l’inconnu.