Le champ pétrolier de Hassi Messaoud était au cœur de l'épopée de la nationalisation

ALGER - Champ pétrolier le plus important du pays en termes de réserves et de volumes de production, Hassi Messaoud avait rendez-vous avec l’histoire le 24 février 1971 avec l’annonce par l'Etat algérien de la nationalisation de ses ressources en hydrocarbures, un évènement qui reste gravé dans la mémoire d'Abdelaziz Krissat, l'un des jeunes ingénieurs de Sonatrach qui ont eu une contribution au recouvrement d'une grande partie de la souveraineté nationale sur les richesses du pays. Chef de base à la Direction des services pétroliers (DSP), M. Krissat a souligné à l'APS que ce gisement pétrolier était au cœur de l'enjeu du succès opérationnel de la nationalisation, et relaté comment les travailleurs, techniciens, ingénieurs et cadres de Sonatrach avaient pu, avec compétence et professionnalisme, assurer la continuité de la production et le bon fonctionnement des installations après le départ des étrangers, quelques semaines seulement après la décision de nationalisation prise par le défunt président Houari Boumediene. A la veille de cette annonce, qui a eu un retentissement international, le vaste champ pétrolier de Hassi Messaoud avait deux districts, "Hassi Messaoud Nord" et "Hassi Messaoud Sud", où opéraient des compagnies algériennes (Sonatrach), françaises ainsi que des entreprises mixtes, conformément aux accords d’Evian 1962. Outre Sonatrach, fondée en 1963, ces sociétés comprenaient l’entreprise mixte Algérie recherche et exploitation du pétrole (ALREP), la Compagnie française des pétroles en Algérie (CFPA) ainsi que la Société nationale de recherche et d'exploitation du pétrole en Algérie (SN REPAL). M. Krissat, spécialiste du forage et de la production, note que la majorité des travailleurs des sites pétroliers de Hassi Messaoud n’avaient eu vent de la décision de nationalisation que 24 heures après son annonce à Alger par le président Houari Boumediene, lors du 15e anniversaire de la création de l’Union générale des travailleurs Algériens (UGTA). Cela s’expliquait, dit-il, par l’isolement des installations de production pétrolière, leur éloignement les unes des autres, ainsi que la faiblesse de la couverture radio à l’époque. L’annonce de la nationalisation, qui a pris le monde de court, faisait suite au refus de la partie française de répondre aux demandes algériennes lors des négociations visant à réviser les redevances pétrolières payées par la France. L’Algérie a décidé de proclamer sa pleine souveraineté sur ses ressources en hydrocarbures et les mettre au service du développement économique et social du pays. Ce pas stratégique, qui est entrée en vigueur immédiatement, a entraîné une augmentation de la participation algérienne à 51% dans toutes les compagnies pétrolières françaises, garantissant ainsi un contrôle effectif. Il a également conduit à la nationalisation des réserves de gaz naturel, du transport et de l’ensemble des pipelines situés sur le territoire national. Sur le terrain, cette décision historique s’est traduite par des responsabilités et des défis encore plus importants pour les travailleurs du secteur, notamment après le départ des cadres étrangers, au moment où la majorité des employés algériens étaient de jeunes techniciens et ingénieurs fraîchement diplômés de l’Institut algérien du pétrole (IAP) et de l’Institut national des hydrocarbures, nouvellement créés. "Nous étions jeunes à l’époque. J’avais seulement 26 ans avec trois ans d’expérience après avoir été diplômé de l’IAP en 1968. Nous devions assumer nos responsabilités", se souvient M. Krissat, ajoutant que "l’amour de la patrie était un élément essentiel pour relever ce défi". Au fil des semaines, Sonatrach a progressivement déployé ses cadres et ingénieurs pour superviser les différentes unités du champ de Hassi Messaoud en prévision du départ des étrangers, et ce jusqu'au 1er mai 1971 qui a été une date décisive dans le processus de nationalisation des hydrocarbures, voire encore plus importante que le 24 février, selon M. Krissat. "Ce jour-là, la CFPA a décidé de retirer tous ses travailleurs français des sites de production. A partir de ce moment, nous, Algériens, avons dû assumer l’entière responsabilité de la gestion des installations. Nous n’étions plus de simples superviseurs, mais bien des gestionnaires directs", explique-t-il, ajoutant que le personnel algérien devait alors assurer le fonctionnement des appareils de forage, gérer la production et garantir la continuité des opérations. Le succès du processus de nationalisation n’aurait pas été possible sans l’engagement exemplaire des travailleurs algériens, malgré les conditions de travail difficiles et les défis techniques rencontrés, souligne encore M. Krissat, relevant également le rôle clé joué par les jeunes du service national ayant une formation technique, et de nombreux autres ingénieurs et techniciens promus pour occuper de nouveaux postes de responsabilité, avec l'appui des instituts spécialisés notamment les annexes de l'IAP. "Bien que nous

Fév 23, 2025 - 15:23
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Le champ pétrolier de Hassi Messaoud était au cœur de l'épopée de la nationalisation

ALGER - Champ pétrolier le plus important du pays en termes de réserves et de volumes de production, Hassi Messaoud avait rendez-vous avec l’histoire le 24 février 1971 avec l’annonce par l'Etat algérien de la nationalisation de ses ressources en hydrocarbures, un évènement qui reste gravé dans la mémoire d'Abdelaziz Krissat, l'un des jeunes ingénieurs de Sonatrach qui ont eu une contribution au recouvrement d'une grande partie de la souveraineté nationale sur les richesses du pays.

Chef de base à la Direction des services pétroliers (DSP), M. Krissat a souligné à l'APS que ce gisement pétrolier était au cœur de l'enjeu du succès opérationnel de la nationalisation, et relaté comment les travailleurs, techniciens, ingénieurs et cadres de Sonatrach avaient pu, avec compétence et professionnalisme, assurer la continuité de la production et le bon fonctionnement des installations après le départ des étrangers, quelques semaines seulement après la décision de nationalisation prise par le défunt président Houari Boumediene.

A la veille de cette annonce, qui a eu un retentissement international, le vaste champ pétrolier de Hassi Messaoud avait deux districts, "Hassi Messaoud Nord" et "Hassi Messaoud Sud", où opéraient des compagnies algériennes (Sonatrach), françaises ainsi que des entreprises mixtes, conformément aux accords d’Evian 1962.

Outre Sonatrach, fondée en 1963, ces sociétés comprenaient l’entreprise mixte Algérie recherche et exploitation du pétrole (ALREP), la Compagnie française des pétroles en Algérie (CFPA) ainsi que la Société nationale de recherche et d'exploitation du pétrole en Algérie (SN REPAL).

M. Krissat, spécialiste du forage et de la production, note que la majorité des travailleurs des sites pétroliers de Hassi Messaoud n’avaient eu vent de la décision de nationalisation que 24 heures après son annonce à Alger par le président Houari Boumediene, lors du 15e anniversaire de la création de l’Union générale des travailleurs Algériens (UGTA). Cela s’expliquait, dit-il, par l’isolement des installations de production pétrolière, leur éloignement les unes des autres, ainsi que la faiblesse de la couverture radio à l’époque.

L’annonce de la nationalisation, qui a pris le monde de court, faisait suite au refus de la partie française de répondre aux demandes algériennes lors des négociations visant à réviser les redevances pétrolières payées par la France. L’Algérie a décidé de proclamer sa pleine souveraineté sur ses ressources en hydrocarbures et les mettre au service du développement économique et social du pays.

Ce pas stratégique, qui est entrée en vigueur immédiatement, a entraîné une augmentation de la participation algérienne à 51% dans toutes les compagnies pétrolières françaises, garantissant ainsi un contrôle effectif. Il a également conduit à la nationalisation des réserves de gaz naturel, du transport et de l’ensemble des pipelines situés sur le territoire national.

Sur le terrain, cette décision historique s’est traduite par des responsabilités et des défis encore plus importants pour les travailleurs du secteur, notamment après le départ des cadres étrangers, au moment où la majorité des employés algériens étaient de jeunes techniciens et ingénieurs fraîchement diplômés de l’Institut algérien du pétrole (IAP) et de l’Institut national des hydrocarbures, nouvellement créés.

"Nous étions jeunes à l’époque. J’avais seulement 26 ans avec trois ans d’expérience après avoir été diplômé de l’IAP en 1968. Nous devions assumer nos responsabilités", se souvient M. Krissat, ajoutant que "l’amour de la patrie était un élément essentiel pour relever ce défi".

Au fil des semaines, Sonatrach a progressivement déployé ses cadres et ingénieurs pour superviser les différentes unités du champ de Hassi Messaoud en prévision du départ des étrangers, et ce jusqu'au 1er mai 1971 qui a été une date décisive dans le processus de nationalisation des hydrocarbures, voire encore plus importante que le 24 février, selon M. Krissat.

"Ce jour-là, la CFPA a décidé de retirer tous ses travailleurs français des sites de production. A partir de ce moment, nous, Algériens, avons dû assumer l’entière responsabilité de la gestion des installations. Nous n’étions plus de simples superviseurs, mais bien des gestionnaires directs", explique-t-il, ajoutant que le personnel algérien devait alors assurer le fonctionnement des appareils de forage, gérer la production et garantir la continuité des opérations.

Le succès du processus de nationalisation n’aurait pas été possible sans l’engagement exemplaire des travailleurs algériens, malgré les conditions de travail difficiles et les défis techniques rencontrés, souligne encore M. Krissat, relevant également le rôle clé joué par les jeunes du service national ayant une formation technique, et de nombreux autres ingénieurs et techniciens promus pour occuper de nouveaux postes de responsabilité, avec l'appui des instituts spécialisés notamment les annexes de l'IAP.

"Bien que nous n’avions pas la même expérience que nos prédécesseurs, nous avons progressivement surmonté les difficultés. Il y a eu quelques retards dans les opérations de forage, ce qui était normal, mais la production ne s’est jamais arrêtée", assure-t-il.

Aujourd’hui, l’ancien ingénieur de Sonatrach appelle les nouvelles générations de travailleurs du groupe et de ses filiales à préserver l’héritage laissé par leurs prédécesseurs en termes d’expertise et d’expérience, notamment ceux qui ont contribué à la nationalisation, tout en veillant à transmettre ce savoir-faire aux jeunes. Il insiste également sur la nécessité de relever le défi de la bonne gouvernance.

M. Krissat, qui a occupé pendant plusieurs années le poste de PDG de l’Entreprise nationale des travaux aux puits (ENTP), souligne les défis actuels de l’Algérie dans le domaine de l’énergie. Il met particulièrement en avant l’importance d’investir dans les technologies et l’innovation, saluant les efforts du pays pour diversifier son mix énergétique en promouvant les énergies renouvelables à travers plusieurs projets ambitieux.