Visas, séjours, naturalisations : les Marocains, premiers bénéficiaires de l’immigration en France
Alors que les projecteurs restent braqués sur l’Algérie, régulièrement pointée du doigt dans les débats sur l’immigration, les données officielles françaises révèlent une réalité bien différente : un schéma migratoire favorable aux ressortissants marocains s’est discrètement imposé en France, porté par une hausse continue des visas de long séjour, des titres de séjour et des […]

Alors que les projecteurs restent braqués sur l’Algérie, régulièrement pointée du doigt dans les débats sur l’immigration, les données officielles françaises révèlent une réalité bien différente : un schéma migratoire favorable aux ressortissants marocains s’est discrètement imposé en France, porté par une hausse continue des visas de long séjour, des titres de séjour et des naturalisations…
Les Marocains sont devenus les premiers bénéficiaires de la politique migratoire française, comme en témoigne la progression conjointe des visas, des titres de séjour et des naturalisations.
Selon les données du ministère de l’Intérieur français, il semble que c’est en 2017 que les flux commencent à évoluer, avant que les visas délivrés aux Marocains ne dépassent ceux aux Algériens dès 2018. Depuis 2019, cette prédominance se confirme sans interruption.
Visas : le Maroc en tête hors tourisme chinois
Entre 2019 et 2024, les Marocains ont été, hors tourisme chinois, la première nationalité bénéficiaire de visas délivrés par la France, toutes catégories confondues, avec 1,182 million d’autorisations Schengen. Un pic a été atteint en 2024 avec 282 993 visas délivrés.
Les Algériens, sur la même période, en ont reçu 1 million, dont 250 000 en 2024 (+22 % sur un an).
Visas de long séjour : les Marocains en tête
Pour les visas de long séjour, indispensables à une installation durable en France, les Marocains sont aussi en tête : en 2024, ils ont obtenu 11 % du total, soit 31 700 autorisations sur 288 049. Suivent les Tunisiens (7 %), les Chinois, les Américains, puis les Algériens (6 %).
Titres de séjour : première nationalité depuis 2018
Cette dynamique s’est traduite par une augmentation nette des titres de séjour, notamment pour les premières demandes.
Depuis 2018, les Marocains occupent la première place, avec 245 709 primo- délivrances en sept ans, soit 35 101 par an en moyenne. En comparaison, les Algériens en ont obtenu 197 075, soit 28 154 par an.
Résidents étrangers : l’écart se resserre
Au 31 décembre 2024, la communauté marocaine comptait 617 053 résidents réguliers en France (+2,2 % sur un an), contre 649 991 Algériens (+0,5 %).
Les Algériens représentent 15 % des 4,331 millions d’étrangers résidant régulièrement en France, contre 14,2 % pour les Marocains.
À ce rythme, les Marocains pourraient devenir, d’ici 2030, la première nationalité étrangère en France — une première historique.
Naturalisations : les Marocains toujours en tête
La tendance se poursuit sur le terrain de la naturalisation. Pour la quatrième année consécutive, les Marocains arrivent en tête, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur (juin 2025).
En 2024, 14 454 Marocains ont acquis la nationalité française (+8,7 % par rapport à 2023), devant les Algériens (12 002, +5,2 %) et les Tunisiens (7 250, +13,9 %).
Entre 2020 et 2024, près de 60 000 Marocains ont été naturalisés, contre 50 000 Algériens et 30 000 Tunisiens.
Ensemble, ces trois nationalités représentent 26 % des naturalisations, réparties comme suit : Marocains : 11 %, Algériens : 9,5 % et Tunisiens : 5,2 %.
Au total, environ 140 000 Maghrébins ont été naturalisés sur cette période, avec une prédominance marocaine (43 %), suivie des Algériens (36 %) puis des Tunisiens (21 %).
Une tendance européenne
Cette domination marocaine en matière de naturalisation ne se limite pas à la France. Elle s’observe également en Espagne, en Belgique, et, dans une moindre mesure, en Italie et aux Pays-Bas.
En France, la continuité de cette dynamique sur l’ensemble des canaux migratoires — visas, titres de séjour, naturalisations — laisse entrevoir une orientation politique de fond, non explicitée, mais qui profite clairement aux ressortissants marocains.
Cette évolution s’inscrit en rupture avec les discours récurrents sur la maîtrise des flux migratoires, et contraste avec le recul relatif de l’immigration algérienne, pourtant
historiquement dominante, dans un contexte de tensions diplomatiques, d’opinion défavorable et de discours sécuritaires visant principalement l’Algérie.
Par Larbi Ghazala